Le
28
avril
2010
à
10:49 par
Olivier Bellamy
Dans le monde riche, mais un peu fermé, du piano français, Jean-Yves Thibaudet dénote, détone, détonne et ne cesse d’étonner. Son jeu clair et brillant s’est abreuvé aux meilleurs sources (Lucette Descaves, Aldo Ciccolini). De la première, il a hérité le respect absolu du texte et l’esprit de Ravel ; du second une âme de virtuose, infatigable et fiable. On le croit vantard car il ne se dissimule pas derrière une fausse modestie de façade, mais il trahit une vraie humilité lorsqu’il avoue aimer par-dessus tout accompagner les chanteurs dans l’ombre. Il a du succès et il le sait, mais il est sans doute l’un des rares musiciens à ne jamais dire du mal de ses collègues. On le croit superficiel car il aime les vêtements voyants et les voitures colorées, mais possède une profondeur d’autant plus réelle qu’il ne l’affiche jamais. Elle est dans son jeu pour qui veut bien faire l’effort de l’écouter. Jamais vous ne l’entendrez se plaindre des voyages, de la carrière, il aime son métier et possède un don de la communication, un naturel qui le rapproche d’Artur Rubinstein. Enfin, il est de son temps. C’est d’ailleurs pour cela qu’il se sent si bien aux Etats-Unis et qu’il a choisi d’y vivre.
La France a longtemps boudé Jean-Yves Thibaudet parce qu’ici, comme le chantait Yvonne Printemps, “on vous pardonne parfois d’avoir réussi, mais jamais d’avoir l’air heureux”. Il serait temps que cela change.
Voici son programme :
*3 petites madeleines de Proust:
-Valse de Chopin en la mineur, Op. Posthume
-l’Alouette (il existe un disque de Roby Lakatos ou ca figure)
-Franck Sonate pour violon et piano, 1er Mvmt
:
-Ravel Ondine de Gaspard de la Nuit
-Liszt : Totentanz
-Chopin 2eme Concerto pour piano et orchestre, A. Rubinstein
-Ravel Daphnis et Chloe, 2eme Suite, C. Dutoit
-Rachmaninov 2eme Symphonie, Mariss Jansons
+ extrait de Rhapsody in Blue (Thibaudet) et disque Bill Evans
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Samuel Rosenfeld, le 28 avril 2010 à 22:06 :
Jean-Yves Thibaudet est un grand pianiste, bien trop rare en France… Les ricains ont de la veine de l’avoir ! Samuel Rosenfeld est déjà allé entendre Jean-Yves Thibaudet à Lille dans Ravel et Rachmaninov. Le Thibaudet était tellement excellent que Samuel Rosenfeld a failli apprécier le concerto pour guimauve en chamallow mineur de Sergei Rachmaninov. Bah… Samuel Rosenfeld avait trop entendu ce concerto lors de son adolescence, période pendant laquelle il est typique que les jeunes hommes – même les plus viriles, comme Samuel Rosenfeld – s’épanchent dans de sirupeux sentiments d’auto flagellation et de gluance molle et néo romantique. Bref, Samuel Rosenfeld en avait soupé de ce deuxième concerto de Rachmaninov, et pourtant Il avait apprécié l’interprétation de Thibaudet.
Samuel Rosenfeld est trop heureux d’avoir entendu un pianiste authentiquement ravélien pour ne pas vous livrer une de ses lectures récentes, car la lutte contre l’opéra italien, fléau des temps modernes, continue (Samuel Rosenfeld a encore croisé une bande de jeune qui squattaient dans un hall d’immeuble en dealant et en frappant de vieilles gens, et qu’écoutaient-ils ? Tosca à fond les balais ! « Yo Rosenfeld ! Viens chanter des opéras italiens avec nous, z’y va ! Va faire l’amour à ta maman ! », un fléau vous dis-je !). L’excellent Alexis Roland-Manuel dit donc : « Ce n’est pas à Ravel qu’il faut demander des œuvres où le sentiment s’exagère sans cesse dans la véhémence de son expression ». Et pan ! Exactement ce que Samuel Rosenfeld voulait dire ! C’est moins bon que du Samuel Rosenfeld bien entendu, mais Roland-Manuel fait ce qu’il peut. Samuel Rosenfeld vous livre la fin de la citation : « Ce n’est pas à Ravel qu’il faut demander de remuer le marais de la concupiscence ou d’ouvrir volontairement les abîmes du désespoir. Si le lac est profond où plonge la merveilleuse Ondine, c’est à sa limpidité que nous mesurons sa profondeur. En un mot, la magie de Ravel est une magie blanche ». Merci à Roland-Manuel d’avoir ainsi porté la charge contre l’opéra carbonara (car c’était bien, sans doute, son intention cachée) et MERCI SAMUEL ROSENFELD. C’EST LA LUUUUUUUUUUUTE FINAAAAAAAALE !
Alain F, le 02 mai 2010 à 11:58 :
Très Sainte Françoise, Soyez bénie d’illuminer ma journée en révélant cette lumière radiophonique.
Un véritable reliquaire pour discophile que ce site.: Rosbaud, Haskil, Abendroth, Yudina, Gigli, Cluytens, Gieseking, Lipatti, Celibidache, Krauss, Arrau, Weingartner etc.…quand j’ai vu Weingartner à Vienne alors que j’avais 28 ans !…… Voilà mes hallucinations me reprennent…Redevenons sérieux , tous ces noms ne devraient pas déplaire à MONSIEUR Tubeuf. Le présentateur de cette radio avec « sa voix de catacombes » a ressuscité Jean Toscane, quels souvenirs…. Magnifique, le concerto « pour piano » de Brahms avec « au violon » Stern ! On pardonne. Très chère Françoise, je ne vous poserai qu’une seule question : quand pourrai-je dormir ?
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